Peter Messervy-Gross, ce nom ne te dit peut-être rien ! Et pourtant il a participé à une course à étapes de +160 kilomètres sur un lac gelé... en jean et en chaussures de ville !
On avait déjà Dingo traileur qui avait eu une petite péripétie le matin de sa course pour l'Ardennes Mega Trail ou encore François qui s'est rendu compte qu'il avait oublié ses semelles pour le Trail des Hobbits et bien sûr, on a tous oublié au moins une fois les fameuses épingles pour accrocher le dossard !
Peter Messervy-Gross a mis la barre encore bien plus haut !
Ce britannique, originaire de Nouvelle-Zélande et père de 3 enfants s'est inscrit à la Mongol 100, une course à étapes de 100 miles soit environ 160 km.
La Mongol 100 fait parti des Rat Race Bucket List Series.
La plus longue distance que Peter ait couru est le Marathon de Paris... La logistique est les paysages sont ce qui l'a poussé à s'inscrire.
Pendant cinq mois, lui et son pote Marcus Liddiard s’entraînent en essayant de reproduire les rudes conditions qu'ils vont endurer pendant la course.
Ils vont s'acheter des équipements pour explorateur. Il raconte au magazine Runner's World que c'est le genre d'équipement que les explorateurs portent lorsqu'ils conquièrent des terres inexplorées".
Il pousse le détail jusqu'à se laisser pousser la barbe pour se préserver au maximum des températures fortement négatives.
En effet, parcourir plus de 160km sur un lac gelé avec des températures pouvant descendre sous les -40°, ne s'improvise pas et nécessite un équipement spécifique ! Ce n'est pas en emportant ta paire de gants, de grosses chaussettes, une doudoune et un bon bonnet que tu vas t'en sortir !
Le lac Khövsgöl Nuur, avec ses 2760 kilomètres carrés, est le plus grand lac d'eau douce de Mongolie.
C'est un lac vieux de plus de 2 millions d'années ! Il fait partie des 17 lacs les plus anciens au monde.
En hiver, il gèle totalement. L'étendue d'eau laisse donc place à une immense patinoire, propice à la Mongol 100.
Peter fait donc ses valises pour la Mongolie en préparant méticuleusement son matériel.
Sa valise bien préparée, il embarque pour son vol en direction de la Mongolie depuis Heathrow à Londres.
Mais lorsqu'il atterri à Oulan-Bator, la capitale de la Mongolie, impossible de remettre la main sur sa valise : la compagnie aérienne a perdu tous ses bagages lors de l'escale à Moscou...
Quatre autres voyageurs, également participants à la course sont dans le même cas que lui.
On leur assure à tous qu'il ne faut pas s'inquiéter, que ça se produit assez souvent et que leurs bagages arriveront le lendemain.
Pour la première nuit sur le sol mongolien, un camp est installé sur le lac.
Il se rassure en se disant qu'il a encore deux jours pour récupérer ses bagages et reste donc confiant.
Le lendemain, bonne nouvelle ! Des bagages arrivent. Les autres participants récupèrent leurs équipements... mais pas Peter dont les sacs restent introuvables !
Déception pour pour lui, mais il garde toujours l'espoir de revoir ses bagages le lendemain.
Le lendemain, mauvaise nouvelle, toujours pas de sac à l'horizon...
Dans un cas pareil, la veille du départ pour une course à étapes comme celle de la Mongol 100, n'importe qui aurait annulé sa participation.
Déjà que parcourir 160km sur un lac gelé est une sacrée aventure ! Alors sans équipement adapté, ça devient quasiment mission impossible !
Pour rappel, les températures sont déjà descendues à -40° sur le lac...
Plutôt que de jeter l'éponge, le papa de 47 ans va tenter de participer malgré tout, avec la tenue qu'il a porté pendant le vol, c'est à dire en jean et en brogue, un type de chaussure de ville en cuir !
Il n'est pas parti de chez lui à Jersey, une des îles Anglo-Normandes, n'a pas parcouru 10 000 kilomètres en faisant des escales à Londres et Moscou et n'a pas dépensé +4000$ en frais d'inscription pour finalement faire demi-tour !
Le directeur de course lui conseille alors de demander aux autres coureurs s'ils n'avait pas d'équipement en double à dépanner.
La générosité des autres coureurs va agréablement le surprendre ! Il raconte que "La générosité des autres coureurs a été tout simplement phénoménale : les gens venaient à moi pour me proposer l'équipement dont il pouvaient se séparer !"
Les conditions sur le lac sont extrêmes et des gens qu'il ne connaissait pas n'ont pas hésité à lui donner ce qu'ils avaient apporté. Abandonner cet équipement signifiait qu'ils pouvaient se mettre à leur tour en grandes difficultés... et pourtant ils l'ont fait !
Avec les vêtements qu'il portait pendant le voyage, l'aide de son ami Marcus Liddiard qui lui prête des crampons pour courir et marcher sur la glace, il peut ainsi rassembler un ensemble complet de vêtements thermiques, des gants, un coupe vent léger, des chaussettes de compression et une casquette orange avec des rabats pour protéger ses oreilles.
Mais personnes n'avait de pantalon ou chaussures. Difficile de trouver chaussure à son pied quand on chausse du 48. Les mongoles ne sont pas réputés pour leur grande taille et les magasins vendent des chaussures qui ne vont "que" jusqu'au 46...
Il s'était préparé à la traversée de ce lac gelé de Khövsgöl Nuur comme tout compétiteur avec la volonté de faire le meilleur chrono et d'être le mieux classé.
Mais, comme il l'a dit, prendre le départ de l'excursion avec des chaussures de ville n'était pas le plus optimal ! Il revoit donc ses plans.
Peu avant le départ, les autres coureurs vont l'étreindre pour l'encourager dans son aventure !
Ils vont le surnommer "The Rogue in Brogues" ce qui donne approximativement le "voleur en Brogues".
Peter s'attendait à ce qu'il s'agisse d'une "course" avec donc une certaine concurrence.
Il réalise, qu'au delà de la compétition, les participants sont venus pour tenter quelque chose d'incroyable, dans un décor naturel et sauvage et ils sont aussi venus pour vivre une expérience humaine.
Les participants peuvent courir, marcher, patiner ou faire du vélo sur le lac, mais Peter est contraint de marcher et courir par manque son d'équipement évident !
Pendant 7 heures les trois premiers jours et 5h le dernier jour, il va donc alterner entre marche et course en mettant "un pied devant l'autre, comme tout le monde".
Dès le départ il se rend vite compte que ses bottes ne sont pas faites pour courir, mais bien pour marcher. Checkpoint après checkpoint, il va tout de même rallier l'arrivée de la première étape, avec des pieds douloureux, mais pas encore trop blessés.
Au fur et à mesure des jours, il constate que ses pieds sont de plus en plus abîmés... Un peu comme tout le monde autour de lui : ecchymoses et autres blessures, tous les participants sont logés à la même enseigne !
Quand on lui a demandé si c'était douloureux, il a répondu: "Ouais ! Tu fais 25 miles par jour pendant quatre jours et pendant ce temps, tes pieds ont tendance à gonfler un peu."
Ce qui a provoqué des frottements, des cloques importantes et la perte d'ongles.
Il confie tout de même "C'est devenu difficile à mesure que l'expédition avançait."
Les autres participants lui offrent une trousse de sécurité d'urgence en guise de récompense pour son courage et sa détermination lors de la dernière nuit !
La dernière étape est vraiment compliquée.
Le vent se joint à l'aventure et les températures chutent aux alentours de -25°.
Ses pieds sont de plus en plus douloureux et il lutte pour ne pas abandonner.
Ses mains commencent également à souffrir avec les gants légers qu'il porte. Heureusement il emprunte des moufles de snowboard.
Il marche au ralenti quand un van de l'organisation arrive à ses côtés.
À l'intérieur, bien au chaud, Léo et James, les caméra-mans de la Rat Race, baissent la vitre.
Ils le regardent droit dans les yeux et mettent en route leur musique.
Le britannique entend "Straight Outta Compton" du groupe de hip-hop américain N.W.A.. Ça le reboost et il se remet à courir.
Finalement, il franchi l'arrivée avec un cri de joie ou de douleur, on ne sait pas trop !
Il laisse ses pieds se reposer et se remettre de l'enfer qu'il venait de leur faire subir.
Il continue à porter ses chaussures jusqu'au retour à l'aéroport.
Et miracle, 15 minutes avant l'enregistrement pour son vol retour, son sac est finalement apparu. Un peu tard !
La compagnie aérienne ne donne aucune explication et le dédommage de 100$ pour le désagrément...
L'aventurier en jean et brogues explique naturellement : "J'ai sorti une paire de chaussures de course et j'ai enregistré le sac".
Il ajoutera quand même que pour sa prochaine course, il allait prendre le plus d'affaire sur lui, juste au cas où !
Il conseille également à toutes celles et ceux qui participent à une course nécessitant de prendre un vol d'emmener en cabine le matériel le plus important !
Peter a déclaré qu'il avait gardé ses chaussures après avoir terminé la course, ajoutant qu'elles étaient toujours dans un état correct.
"Je les ai mis l'autre jour", a-t-il dit, "elles sont en bon état, bien faite à mon pied !"
Depuis, il a été contacté par l'entreprise qui a équipé la première ascension de l'Everest en 1953. ils lui ont demandé si ils pouvaient analyser ses chaussures.
Il a simplement répondu qu'il les exposera dans une vitrine avec un message « Cassez la vitre en cas d’urgence. » !
Toi aussi tu as déjà oublié quelque chose pour une course ? Raconte-nous quoi et partage ton anecdote de course à pied !
La Rat Race Bucket List Mongol 100 de 2019 à laquelle Peter a participé :